27 novembre, 2006

Mission à Gourcy (4)


Samedi 9 juillet 2005

Tôt le matin, je me mets en route seul en direction de la rue des Archives Nationales, non loin de la maison de Quentin, pour faire quelques photos dès le lever du soleil. Une quantité invraisemblable de commerçants s’active déjà en tous sens. Pas mal d’ enfants sont au travail et vendent tout ce qu’il est possible de vendre : des fruits, des arachides, de la corde, des sandales « made in China », des récipients en plastic multicolores,…
Il y a aussi quelques bars improvisés déjà ouverts : 4 planches, une tôle en guise de toiture et quelques casiers de bière font l’affaire. Des ânes se faufilent dans la circulation et grappillent ce qu’ils peuvent de nourriture dans les immondices. Ils sont en concurrence directe avec des nuées de charognards sans peur et sans reproche.
A regret, je dois rapidement interrompre mon exploration des environs : nous avons une longue route à faire ce matin pour nous rendre à Ouahigouya, à environ 200 kilomètres au nord - ouest de Ouagadougou. Cette étape a été souhaitée par Quentin ainsi que le maire de Gourcy afin de nous faire connaître une association particulièrement dynamique dans le domaine social.
La route qui nous mène là-bas est impeccable, un véritable ruban de goudron traversant un paysage tout à fait plat. Cette artère, une des principales du pays, est bien entretenue. L’on doit par ailleurs s’acquitter d’un droit de passage dès que l’on quitte la ville et que l’on s’engage sur cette voie.
En chemin, la végétation est relativement maigre : un maquis pas très dense duquel émergent, par-ci par-là, de grands baobabs.
Nous traversons quelques hameaux. Il s’agit souvent de petites entités d’une dizaine de huttes en terre de forme circulaire et couvertes de chaume. Aux alentours paissent parfois de petits troupeaux de chèvres.

Dès notre arrivée à Ouahigouya, nous sommes accueilli par Moussa. Une sorte de PDG du social qui, avec le succès de son association ECLA (Etre Comme les Autres) a quasiment acquis ici une stature d’ homme d’état. Physiquement déjà, l’homme en impose avec son double-mètres, sa bonne centaine de kilos et sa poignée de main à vous broyer les phalanges. Nous apprendrons par ailleurs qu’il fut boxeur professionnel dans sa jeunesse.
Moussa est décidément un hyper-actif dans son secteur. Il a à son palmarès la constitution d’un atelier d’artisanat pour handicapés, d’un service de collecte et de tri d’ordures, d’ un atelier de réparation de bicyclettes, d’ un système de location de charrette-réservoir d’eau et même d’une banque de micro-crédits. Nous passons un bon moment à passer en revue ces différents services en compagnie du patron.
Nous sommes ensuite conviés à un repas préparé, nous dit-on, spécialement en notre honneur.
De fait, nous siégeons, Michel, Quentin et moi avec le Maire de Gourcy, son épouse, les adjoints communaux et bien entendu le président de l’association sur une estrade où une grande table a été dressée. En contre bas, face à nous, l’ensemble du personnel a été invité comme pour assister à notre repas. Un singulier public composé de personnes invalides, handicapées, aux membres amputés ou atrophiés.
Ce repas consistera en un gargantuesque couscous qui sera, Dieu merci, partagé plus tard avec les membres du personnel….une fois le service à la table des « officiels » terminé.

Nous prenons congé de Moussa et de son association dans le courant de l’après-midi pour nous diriger enfin vers Gourcy, ultime destination de ce voyage. Une chambre nous a été réservée dans une auberge un peu à l’écart du village et de la grand route. Cet établissement (Le Cites) , existe depuis un an. Il y a une quinzaine de chambres disposées autour d’un petit patio, une grande pièce à l’air libre faisant à la fois office de salon communautaire et de réfectoire ainsi qu’un petit jardinet où le personnel s’approvisionne en condiments étranges. L’eau est quant à elle fournie par un réservoir situé au sommet d’un robuste échafaudage.
Pour ce premier repas à Gourcy, la cuisinière a préparé un spaghetti froid accompagné d’une sauce à base de viande de chèvre.
Au préalable nous aurons pris une petite bière en guise d’apéritif offert par le Maire, toujours flanqués de ses conseillers et d’un curé de passage qui s’endormira d’ailleurs aussitôt après avoir ingurgité son rafraîchissement.
Nous apprenons au cours de la conversation qu’une aile du bâtiment vient tout juste d’être affectée à la création d’un « cyber-centre » . Il y a déjà une dizaine d’ordinateurs opérationnels à la disposition des personnes qui veulent s’initier à l’informatique. Je demande aussitôt à Simon, le patron de l’établissement, à pouvoir utiliser l’une des machines pour envoyer un mail en Belgique. Malheureusement, ce ne sera guère possible car il y a de gros problèmes de connexions aujourd’hui. « Mais demain, tout devrait être réglé, m’assure le responsable ».L’électricité également jouera des tours ce soir. Mais cette fois, c’est dans l’ordre des choses, apprend-on, puisque c’est chaque nuit, à 1 heure du matin exactement, que le courant est systématiquement coupé. Un détail qui a son importance car cette coupure engendre évidemment l’arrêt des ventilateurs. Les nuits risquent d’être chaudes….

26 novembre, 2006

Mission à Gourcy (3)

Vendredi 8 juillet (suite)

Après une courte -et suffocante- nuit nous prenons le petit déjeuner en compagnie de Quentin, Zoé et leurs 2 charmants enfants –Daphné et Lucien-, une petite réunion informelle est ensuite programmée. Le Maire de Gourcy et 2 autres coopérants (Un Français –Christian- et une Belge –Delphine- y prendront part). Cette réunion aura pour but de nous éclairer un tant soit peu sur la situation socio-économique du pays. Je prends quelques notes en vrac et à la volée : la monnaie en cours est le franc CFA et 1000 Francs CFA valent +/- 1,5 euros (cours de juillet 2005). Le salaire d’un ouvrier de base est de 28.000 F CFA soit quelques 45 euros mensuels. Un instituteur peut quant à lui espérer 40.000 F CFA mensuel en début de carrière et jusque 100.000 F CFA en fin de carrière. Un cadre supérieur recevrait en revanche un salaire net d’environ 250.000 FCFA, nous précise le Maire.

Les deux principaux partis politiques en présence sont l’ ADF-RDA (Alliance pour la Démocratie et la Fédération + Rassemblement Démocratique Africain) qui, selon les termes de son Président Gilbert Ouedraogo, est un parti libéral, celui des indépendances, et aussi le premier parti d’ opposition au Burkina Faso. Le deuxième parti, majoritaire, est le CDP (Congrès pour la Démocratie et le Progrès). Ce dernier, se définissant comme un parti social-démocrate, est né de la fusion de 13 partis et formations politiques diverses. Le président élu, Blaise Compaoré, appartient évidemment à cette formation de même que Dominique Ouedraogo, le Maire de Gourcy qui nous accueillera prochainement dans sa commune.
Côté agriculture, les principales ressources sont le mil, le sorgho, la mangue et le coton cultivés généralement sur de modestes parcelles appartenant à de petits propriétaires équipés d’outils rudimentaires.

En ce qui concerne la religion, plus de la moitié de la population est musulmane, 30 à 40% est catholique et le reste se partage entre les cultes protestants ou encore animiste. Au rayon des ressources naturelles, il y aurait un peu d’or dans le sous-sol. Deux barrages hydroélectriques et autant de centrales thermiques fournissent l’électricité du pays. Electricité dont à peine 15% de la population peut profiter.

A la fin de cette réunion informelle, le Maire de Gourcy s’inquiète à nouveau de n’avoir toujours pas de nouvelles de nos bagages disparus la veille. Pour tenter de nous dépanner il contacte par téléphone le tailleur de Gourcy afin qu’il nous confectionne d’urgence un costume.
Je me demande à quoi vont ressembler ces vêtements étant donné qu’il ne connaît pas notre taille et ne nous a pas mesuré !

Quoi qu’il en soit, nous décidons néanmoins de passer quelques heures dans le centre-ville afin de nous constituer un semblant de garde-robe. Dans une superette du coin, je dégotte quelques vêtements qui feront l’affaire : 2 t-shirts, 4 paires de chaussettes, 4 slips, une chemise et un pantalon, le tout pour 21.000 francs (CFA) ou 30 euros.

La ville est grouillante. Les vélos et les mobylettes sont les maîtres de la route.
Sur les trottoirs, on peut voir une multitude de petits commerces où on l’on peut tout acheter : des plats cuisinés, du charbon de bois, des pilons de poulet ou des chaînes de vélos, des casquettes de rappeurs ou des cassettes vidéos, il y des ateliers de petites mécaniques, des réparateurs de machines à coudre, des vendeurs de sucreries (limonades), de CD ou de cartes téléphoniques, j’en passe…….

Les ordures sont omniprésentes. Une odeur âcre prend parfois à la gorge. Dans ce quartier, par exemple, les égouts sont à ciel ouvert.

En début d’après-midi, un violent orage éclate . Des nuages de terres rouges sont soulevés par la tempête. On n’y voit plus rien. La circulation semble tout d’un coup paralysée. Les bâches des échoppes s’envolent. Les marchandises tombent , des fruits roulent sur le sol. Au bout d’une quinzaine de minutes et après une grosse averse, tout rentre dans l’ordre et, plus que jamais, cette odeur de terre mouillée monte à la tête.

La population est à la fois curieuse et aimable à notre égard. Les conversations s’engagent vite. Il n’y a aucune agressivité ou de racisme perceptible.

Un peu partout à travers la ville, on distingue les silhouettes des mosquées, des églises ou des temples protestants « Toutes ces religions vivent en bonne harmonie ici, nous avait dit ce matin Dominique Ouedraogo, moi même je suis catholique et ai fait une bonne partie de mes études au petit séminaire, par contre mon frère est musulman, cela n’empêche aucunement les bonnes relations avait précisé le Maire ».

Nous terminons cette brève incursion dans la capitale par le quartier dénommé « Ouaga 2000 ». Une sorte de vaste terrain vague où l’on construit à tout va, notamment des bâtiments grandiloquents imaginés par de richissimes propriétaires. Plus loin on passe devant le monument aux Héros de la Nation puis, au bout du Boulevard Kadhafi on aperçoit le palais présidentiel. Mais, visiblement le chauffeur de Quentin est mal à l’aise, il rebrousse chemin et me fait comprendre qu’il n’est pas bon de s’attarder ici et encore moins de prendre des photos du bâtiment. Il ne voudra pas nous en dire plus.

Le soir venu, nous partagerons un excellent spaghetti que Zoé nous a préparé. Nous passons le reste de la soirée dans la serre a discuter. Pendant ce temps, sur les murs, les geckos font leurs numéros d ‘équilibristes.

Je téléphone à Marie –Hélène et Pablo pour leur donner quelques nouvelles puis joue un peu avec Daphné. La fille de Quentin et Zoé va à l’école dans un lycée français. Un établissement fréquenté par des enfants de coopérants étrangers, d’hommes d’affaires ou de notables burkinabés..
« Ces derniers vivent parfois complètement en dehors de la réalité, déplore la maman de Daphné, alors que le pays connaît de graves problèmes d’approvisionnement en eau, certains parents d’élèves que nous côtoyons à l’école semblent n’avoir d’autres problèmes que de trouver un chlore de bonne qualité pour désinfecter la piscine!"

20 novembre, 2006

Mission à Gourcy (2)

Jeudi 7 juillet 2005

Aéroport de Zaventem. 12h43.Venons d’accomplir les formalités douanières. Michel, se rend compte à cet instant qu’il a oublié de retirer de l’argent. Il repart en sens inverse à la recherche d’un distributeur de billets. De toutes façons, il n’y a pas le feu, nous venons d’apprendre que notre vol à destination de Ouagadougou, un 737 de la Royal Air Maroc, aurait un retard de plus de 40 minutes.
En attendant le retour de mon compagnon de voyage, je prends la direction du premier bar et commande un café…. facturé 2,80€. A ce prix là, on a intérêt à ne pas boire trop vite.
Dans l’établissement, un attroupement s’est formé autour de la télé qui diffuse en permanence les programmes d’une chaîne américaine de « news ». Les informations ont l’air alarmantes. Londres vient de subir une triple - voire une quadruple- attaque simultanée dans le métro mais également dans un bus. Le journaliste, à la mine atterrée, évoque déjà une possible responsabilité d’Al Quaeda et déconseille d’ores et déjà à chacun tout voyage en direction de l’Angleterre et ce, jusqu’à nouvel ordre.
C’est le genre de nouvelles qui n’est jamais très encourageantes, tout particulièrement lorsqu’il est prévu que l’on passe le plus clair de sa journée à bord d’un avion ! Le spectre des attentats du 11 septembre n’est en effet jamais très loin.
Comme d’habitude, mes inquiétudes à ce sujet seront vaines et sans fondement.
Effectuons une première escale à Casablanca après 3 heures de vol tout à fait tranquille. Deux heures d’attente puis de nouveau 4 heures de vol jusque Niamey, capitale du Niger.
A présent, nous ne sommes plus qu’une petite trentaine de voyageurs à bord de l’appareil. Vraisemblablement quelques hommes d’affaires, des diplomates tirés à quatre épingles et des familles de retour au pays. Aucun touriste.


Vendredi 8 juillet 2005

Atterrissons à Ouagadougou à 1h18 du matin (heure locale). Jusqu’à la dernière minute, rien ne laissait supposer que nous allions atterrir dans une capitale de près d’1.200.000 habitants. Vu du ciel et de nuit, à peine quelques lumignons épars semblent indiquer une présence humaine en ces lieux.
La température cette nuit est de 26 degrés. C’est la saison des pluies, la chaleur est moite. Il y a une forte odeur de terre mouillée.
Quentin, coopérant belge et notre contact sur place, est venu nous attendre en compagnie de Dominique, le Maire de Gourcy et l’un de ses adjoints. Les présentations faites et les cachets d’entrée apposés sur nos passeports, nous nous dirigeons aussitôt vers la pièce où sont entreposés les bagages. Tous les autres passagers ont déjà récupéré leurs effets et s’en sont allés. Sur les étals où auraient dû en principe se trouver nos valises, il n’y a plus rien. Nous attendons encore quelques instants puis nous nous informons auprès d’un employé afin de savoir s’il y a encore du matériel à débarquer de l’avion en provenance de Casablanca. Sa réponse est formelle : les soutes sont vides. Il nous conseille d’aviser le service compétent afin de déclarer la perte de nos bagages. Là, une fonctionnaire se veut rassurante : « il se peut qu’une erreur se soit produite à Casablanca, lors du changement d’avion, et que nos valises soient restées au Maroc. Dans ce cas, précise-t-elle, nos devrions assez rapidement retrouver leurs traces et vous les faire parvenir dans les plus brefs délais. Nous laissons donc nos coordonnées ainsi qu’une adresse à Ouagadougou où nous pourrons être avertis.
Traversons Ouagadougou dans la nuit à bord de la voiture de Quentin. Les avenues sont étonnement vides. Les innombrables échoppes au bord du chemin sont fermées, les rues adjacentes paraissent défoncées et certaines personnes dorment à même le sol. Cà et là, des petits groupes sont massés autour d’un téléviseur que l’on a sorti sur le trottoir.Nous prolongeons notre route encore une quinzaine de minutes et arrivons dans la banlieue où Quentin habite. Sa maison est de plein-pied, elle est modeste mais agréable: Un living-salle à manger, une cuisine, 3 ou 4 chambres, une douche et une serre dont les fenêtres sont hermétiquement couvertes de moustiquaires. Dans chaque pièce l’air est brassé par les palles d’un grand ventilateur. Un dispositif qui n’est vraiment pas un luxe par cette chaleur étonnement suffocante et humide. Nous partageons un premier repas léger en compagnie de Quentin et de son épouse Zoé après quoi nous irons prendre quelques repos sous la moustiquaire et dans le ronronnement lancinant du ventilateur. Je trouve difficilement le sommeil tant il fait chaud. Il me semble que je n’ai jamais autant transpiré !

15 novembre, 2006

Mission à Gourcy (1)

Le carnet et les photos qui seront publiés au cours des prochains jours ont pour thème un voyage d’une dizaine de jours au Burkina Faso. Il s’est déroulé au mois de juillet de l’année 2005 et s’est inscrit dans le cadre d’une mission dont l’intitulé officiel –un peu ronflant certes- était « Identification pour un projet de coopération au développement à Gourcy ». Une initiative de la Commission Solidarité-Oupeye –il s’agit d’une plate-forme composée de diverses ONG, d’ associations locales ainsi que de l’administration communale d’Oupeye pour laquelle je travaille. Les commentaires et impressions qui vont suivre sembleront peut-être quelque peu naïfs : il s’agissait en effet pour moi d’une toute première incursion en Afrique sub-saharienne. Bien qu’habitué à des séjours dans des conditions parfois difficiles, notamment en Amérique latine, le choc avec ce continent et tout particulièrement le Burkina Faso fut assez rude mais….incomparablement passionnant.
A très bientôt et bonne lecture…


un peu de musique burkinabée en cliquant sur ce lien

(ouagadougou, avenue des archives nationales)

10 novembre, 2006

Balades automnales (2)

Sur les hauteurs de Haccourt, peu avant le lever du soleil, novembre 2006






Vers Heure-le-Romain, depuis la "Croix des Pîreus" , novembre 2006

pâtures à Heure-le-Romain

08 novembre, 2006

Balades automnales (1)

Changement d’ambiance avec cette petite série de photos prises la semaine dernière au cours de balades automnales et vélocipédiques. Elles ont pour cadre la région de la Basse-Meuse (à un jet de pierre de la frontière hollandaise) où j’habite depuis près de 25 ans. Lors de ces promenades matinales et solitaires, on peut apercevoir les lièvres en goguette, les faucons crécerelles perchés au sommet de quelque vieux chêne ou encore les faisans jouant à cache-cache avec les chasseurs embusqués – c’est de saison- ! Bien que cette petite faune n’apparaisse guère sur les photos en question, croyez-moi, elle est bel et bien présente !



(canal Albert depuis "li hôte voye")


(vers Heure-le-Romain depuis le lieu-dit "al tombe)


(Houtain-saitn-Siméon, l'ancienne voie du tram Genk-Liège)



(Heure, culture de chrysanthèmes au lieu-dit "Baronhaie")